2/3. Là j'ai vraiment connu la joie, visiteuse forcenée, archange tumultueux qui pénétrait en moi avec toutes ses ailes pour m'entraîner, trébuchante de radieux vertige, vers les régions illimitées de l'espérance. Continuité des choses, jeunesse des éléments, vous que j'ai contemplées avec les yeux éblouis de l'enfance, plus brillants que le vert thuya grêlé de soleil, vous étincelez toujours, et moi je passe, bientôt j'aurai passé. Quand mon esprit est sans cesse transformé par les arabesques des événements, semblables à la course des nuages, je retrouve toujours pareille, active, satisfaite, honnête, la petite ville rêveuse de mon enfance. Je suis au milieu de ma vie qu'encore le couvent des Clarisses, bien qu'abandonné à présent, garde dans un matin de mai sa juvénile beauté.
Mêlant mes souvenirs à la pure matinée, je vais essayer de dépeindre sa joie rustique, sa blancheur de tubéreuse, ses lignes bien tendues, qui, contenant l'azur, le silence, la musique, de frémissantes prières et le sol vivace d'un jardin ordonné, me dispensaient tour à tour le calme captivant et l'allégresse dionysiaque.
De bonne heure, le dimanche matin, sous le soleil de juillet et d'août, nous nous hâtions vers la chapelle du couvent. La route à parcourir était assez longue, moelleuse de poussière blonde, bordée d'un côté par les ronciers et les mûriers où les volubilis, si fragiles naissaient, disparaissaient, comme un regard et un soupir de fleur. De l'autre côté de la route, les collines s'appuyaient amicalement à l'espace, s'incurvaient pour laisser courir la ligne argentée où s'élançaient les trains, et précipitaient dans la plaine de petites sources torrentielles, qui s'abattaient en bouillonnant, en chuchotant, comme pour porter aux prairies, parmi les verts osiers, je ne sais quelle heureuse nouvelle des sommets.
62. Ce que j'appellerais le ciel 2/3
Il se trouvait à l'emplacement de l'actuel Supermarché Casino
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